Archive pour mai 2016

Grève générale

Dimanche 29 mai 2016

feu

Grève générale

Ils ont mis le feu aux palettes et aux pneus
à l’entrée du dépôt de carburant
pour empêcher les camions de ravitailler les pompes.
« Ça va leur chauffer les fesses là-haut ! », s ‘exclame Jérôme
(Il ne pense ni au sexe des anges ni aux petits oiseaux).

La nuit est fraîche, le printemps est récalcitrant.
Sur le piquet de grève, ils sont plus de deux cents ;
La fournaise des colères réchauffe l’atmosphère.

Quand on ne les écoute pas, quand on ne veut pas les voir
quand ceux qui sont en haut refusent d’entendre ceux qui sont en bas
les travailleurs n’ont pas d’autre choix.

Les cheminots
qui tous les jours assurent les transports de millions de passagers
mettent les trains à l’arrêt…

Les dockers qui désengorgent les navires et les ports
laissent tout à quai…

Les électriciens qui veillent sur le feu nucléaire
lui disent de se taire…

Les ouvriers de la raffinerie qui délivrent d’habitude le sang noir
qui alimente tout le système circulatoire
du pays coupent le robinet…

Pour tout débloquer
les travailleurs n’ont pas d’autre choix
que bloquer tout.

Et voici que soudain tout le monde voit
ceux qui d’ordinaire sont invisibles,
ceux auxquels on ne fait pas attention,
ceux qui ne passent pas à la télévision.

C’est quand plus rien ne tourne
que chacun peut voir
grâce à qui la Terre tourne.

Dimanche 29 mai 2016

La verrière

Samedi 28 mai 2016

verrière usine


La verrière

L’usine détruite laisse voir sous le ciel à nu
sa verrière où se reflètent les jours chômés ;
verrière abandonnée, hommes mis au rebut…
Les usines sont les cathédrales martyrisées
de l’âge de l’industrie.
Mais la classe ouvrière aujourd’hui crucifiée
sur le trepalium du marché mondial
demain ressuscitera
plus forte encore.

L’histoire des prélats et des maîtres
préfère ne rien savoir
de ceux qui ont œuvré dans le noir à leur gloire :
constructeurs de cathédrales et de palais,
serfs, paysans,
ouvriers,
peuples colonisés,
salariés, précaires
dont jamais ils n’ont pu se passer,
et dont ils ne se passent toujours pas,
prolétaires des quatre coins de la Terre
dont l’heure un jour viendra.

 

Même si le rêve en semble aujourd’hui impossible,
un jour viendra leur tour,
le jour où les lois de l’économie
seront pour tous transparentes comme la verrière
de l’atelier par où passe la lumière du soleil
qui tombait comme une bénédiction,
une brûlure ou un sourire fraternel,
sur le poste de travail,
la machine-outil, la fraiseuse et le tour
maintenant endormis…

Ce jour viendra
quand les prolétaires
venant des quatre coins de l’horizon
innombrables et transparents
comme les gouttes de pluie
glissant sur la verrière
formeront dans les rues de la ville
une seule rivière
et à leur tour licencieront
les lois sacro-saintes du marché.

 Poème figurant dans le recueil « Arsenal-Traces »,
(sur la fermeture de l’Arsenal de Tarbes)
publié par la Malle d’Aurore et René Trusses
avec des textes de vingt poètes
et des photos d’Ili Endewelt

 

L’oxalis

Lundi 16 mai 2016

oxalis

L’oxalis

La petite fleur mauve de l’oxalis
envahit — pacifiquement
le territoire des pâquerettes.
Petite fleur des bordures
elle ne se laisse pas tenir en lisière.
c’est une fleur de liberté
qui essaime où ça lui plaît.
Modeste fleur du faux-trèfle
à quatre feuilles
du vrai porte-bonheur
elle n’a pas le label.
Mais elle est belle
et ça suffit
pour aujourd’hui
à mon bonheur.

16/V/2016

La Complainte du chien de deuxième catégorie

Vendredi 6 mai 2016

Voyou Sciotot

 

La Complainte du chien de deuxième catégorie

Je connais un chien, ce n’est pas un fasciste
Bien qu’il soit avec les autres chiens raciste.
(La notion de race parmi les chiens existe).

C’est un chien tranquille qui respecte l’ordre.
(Si on touche à son maître, il peut même mordre)
Mais tire sur sa laisse et aime à la tordre.

Sitôt que passe un chat, il est aux abois.
Dès que quelqu’un sonne, le voilà qui aboie
Et vous saute dessus, comme au coin d’un bois.

Si vient un étranger, il montre les dents
Il y voit un danger, en bon chien méchant,
Et si l’on s’approche, sa gamelle il défend.

(De sa propre pâtée, c’est un fanatique).
Quand trottine un caniche, il court et le chique ;
S’il croise une chienne, il se dit « Je la nique ! »

Liberté, égalité, fraternité…
Il se fout des valeurs de l’humanité
Mais il a le sens de la propriété.

Il se fout aussi du sort de la planète.
Seuls valent, à ses yeux, son tapis, ses croquettes
Et marquer son terrain avec sa quéquette.

Lui Président de la République,
l’Etat en serait-il vraiment plus inique ?
(Mais mon chien n’a pas d’ambition politique).

Heureusement mon chien n’est pas électeur…
Mais beaucoup le sont qui ne sont guère meilleurs
Pire même que des chiens, pour leur propre malheur.