Pierre Laurent – 1942
pour Ginette Laurent

Pierre Laurent et sa famille quelques mois avant sa mort.
Ginette, la maman de Patricia, est à gauche sur la photo.
Un poème sur le grand père de Patricia, ouvrier à Asnières. Tué par la police française pour fait de résistance en 1942.
Ouvrier en usine il aimait dessiner
Et faisait au fusain le portrait des enfants.
Il avait sur la porte d’une vieille armoire
Au burin dans le bois taillé des hirondelles…
Sa fille se souvient qu’il était musicien.
Ce grand gaillard fleur bleue tâtait de la chanson.
Il jouait dans son lit sur son accordéon
Parfois Cœur de cristal ou Reine de Musette…
(Le pays sous la botte avait perdu ses ailes
Et l’heure n’était plus guère aux bals ni aux chansons).
Alors Pierre, sur les murs, collait des papillons :
« Du pain pour les vieillards ! Du lait pour les enfants ! »
Un soir, les policiers ont serré son copain ;
Lui a pu s’échapper… Il est rentré chez lui
Et fait brûler ses tracts dans le poêle Godin.
Mais les flics ont rappliqué et l’ont embarqué.
D’après le témoignage d’une fille de joie,
Ils s’y sont mis à trois, dans le commissariat,
Pour le rouer de coups et l’ont laissé pour mort.
Puis il fut condamné à six mois de prison.
Mais la Santé n’a pas arrangé sa santé…
Il passait son temps à cracher des fleurs de sang
Et n’a quitté la prison que pour l’hôpital.
(Jamais il ne devait retourner près des siens).
Ouvrier aux mains d’or, pour le bois et le métal
Prolétaire résistant, tué par la police
Homme simple, Cœur de cristal et mains d’argent,
et pour tout mémorial, des fleurs rouge de sang.