Mea Culpa ?
(N’y comptez pas.)
Il me faut avouer toute honte bue
(La honte est pisse d’âne ou petite bière,
Ce n’est pas avec elle qu’on se désaltère)
Ce qui d’ordinaire en poésie est tu.
J’ai toute ma vie remué ciel et terre,
J’ai manié la truelle et me suis battu,
Souvent défait mais jamais vraiment vaincu
Pourtant je ne suis toujours pas millionnaire.
Les rafiots que j’ai mis à l’eau ont tenu
Mais jamais je n’ai fait au vrai des affaires…
– Mon pauvre, en affaires, il paraît que t’es nul
Poète, tu ne dois pas savoir compter
Si ce n’est sur tes doigts le nombre des pieds.
(Enfant tu étais très mauvais en calcul…
Il est tard aujourd’hui pour t’améliorer).
Tu n’as jamais su amasser de pécule
Miser de l’argent et le faire fructifier
En bons placements, en gens à exploiter.
Tu ignores tout de comment on spécule
Et tu t’es lancé sur les flots déchaînés
À la rame, avec ta barque de papier
Et tes frères d’aventure… C’est ridicule !
Poète, tu es un mauvais gestionnaire !
– Je sais… La faute est honteuse, même pire.
L’argent est de tout désormais le critère
Il est le seul dieu véritable sur Terre.
On juge à son aune les arts et les empires,
La valeur, le sport, les chanteurs, les carrières,
Le sens du travail, le succès littéraire…
La politique aussi se doit de servir
L’économie, c’est le règne des affaires
Et qui le refuse ici n’a rien à faire.
Au vrai, n’ayant pas cherché à m’enrichir
J’y suis parvenu… et dois m’en satisfaire.
Sébastien ne fut pas plus que moi criblé
Mais pour moi ce sont des flèches de papier :
PV, relances, lettres d’huissier, factures…
Attaché au poteau je reçois les traits
De leurs arbalètes, et étant sans armure
Si elles ne tuent pas, elles causent des blessures…
Or n’ayant jamais opté pour la tonsure
Ne comptez pas que je vante Pauvreté.
La pauvreté est un costume étriqué
Qui sérieusement vous gêne aux entournures ;
En elle il n’y a aucune sainteté.
Mais je vais répétant à qui veut l’entendre
« Poète pauvre vaut mieux que pauvre poète »
J’entends, qui n’a guère plus d’une idée en tête,
Sans inspiration, pâle et froid comme cendre
Privé de flamme… n’ayant plus que des lettres.
Vu du pas de ma porte, de ma fenêtre
Le poète pauvre est plus riche, à tout prendre !
Même si je dois, mes amis, reconnaître
Que la vie du commun n’est pas toujours tendre,
C’est de ce côté que le sort m’a fait naître
Et il est sans prix de n’être pas à vendre.
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