Archive pour août 2019

Ballade pour une pomme trouvée

Samedi 17 août 2019

Pommes

Pomme je suis, le ver en moi
Joyeusement fait son office
Et ce que, terrible, de moi
Ici je dis, parlant à tous,
Je pourrais de chacun le dire

Le soleil sur ma joue se joue
Au milieu des gouttes de pluie
Et puis s’en va s’en vient le vent…
Marchant dans l’herbe j’ai trouvé
Une pomme à moitié rongée

Pomme encore verte abandonnée
Qu’un coup de vent a fait tomber
Avant son heure de son pommier
Elle a pris un coup sur la joue
Etalée la pomme est talée

Mais d’un ver elle fait bien l’affaire
Qui creuse un tunnel dans sa chair
Quand d’autres en seraient dégoûtés
Certains la trouvent à leur goût
(Il en va de même pour nous)

La croisant je pense à ses sœurs
Luisantes, rondes, calibrées
Lisses, bien rouges, vertes, dorées
De la grande distribution,
Pauvres pommes conditionnées…

Ce sort nous sera épargné,
Nous sommes pommes qu’on délaisse
N’avons ni prix ni pedigree
Nul comice ne nous prima
On ne nous vend pas à la tonne

Puissions-nous pourtant mes chères sœurs
Pommes sauvages, acidulées
Trouver preneur… Moi, vif ou mort
J’espère avoir du goût encore
Pour qui voudrait croquer dedans.

 

Bal macabre en bord de Loire

Lundi 5 août 2019

FRANCE-MISSING-INVESTIGATION-POLICE-ART-MUSIC

pour Steve

Les eaux qui s’en vont vers le lointain m’appellent…
Elles passent, elles s’enfuient effaçant  les histoires
Elles portent dans leurs flancs d’oublieuse mémoire
Les traces de nos vies,  les meurtres, les querelles.

Dans l’eau nocturne et trouble où nulle étoile ne veille
Un corps est retrouvé qui met fin au mystère
– Il met fin à l’attente, aux nuits de longue veille
(Mais le mystère n’a guère de place en cette affaire).

Ah ! Le fleuve est obscur, on dirait un tunnel
D’où jamais ne devait sortir la vérité.
– Mais n’allez pas chanter que la Loire est cruelle
Ou que c’est un effet de la fatalité.

Il n’avait pas rêvé prendre un bain de minuit.
Sa faute fut d’avoir fait la fête et dansé.
Jetés à l’eau les jeunes ne font plus de bruit
Et tant pis si certains ne savent pas nager !

Un corps est retrouvé au milieu des vasières…
Il a dû séjourner dans la nuit des lamproies
Des algues, des aloses… Involontaire proie,
Vivant en ville, des violences policières.

Si les eaux qui s’en vont se perdent dans l’estuaire
Peuvent-elles effacer le crime en bord de Loire ?
– Les eaux, les eaux, petit, n’ont aucune mémoire
Mais ceux qui étaient là refusent de se taire.

« Sur l’quai de Nantes, un bal y est donné
Non, non mon fils tu n’iras pas danser !
Tu vas danser et puis dans l’eau tu glisses…
Il y a danger car rôde la police.

Non, non, ma fille tu n’iras pas danser
Sous peine aussi de te faire noyer.
Il nous faut croire les autorités :
Voici le sort des enfants obstinés. »

Tournesols

Vendredi 2 août 2019

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(La compagnie des tournesols)

Plantés au beau milieu du champ de bataille.
Ils sont rayonnants.
Armée de tournesols en leur midi.
Innombrables, fiers et lumineux dans la clarté du jour
Ils portent sur la terre les armes du soleil
En rangs serrés, bataillons de la jeunesse ardente à qui tout est promesse
Ils ont pour eux l’espérance, la justice, l’avenir et le droit
Ils se lèvent dans la plaine et déferlent des collines
Ils se tiennent debout, droits et magnifiques
Ils décrètent leur clarté victorieuse sur la nuit et sur l’obscurité caverneuse du passé
Leur œil unique fixe le centre de l’été
Puis vient la fin de la saison
Ils ont bu du regard tant de soleil
que leur rétine en est brûlée,
leur œil immense a noirci,
leur cœur est lourd
et, quand le jour décline, ils courbent la tête,
disposés à donner le meilleur d’eux-mêmes,
mûrs pour la moisson,
prêts pour le passage de témoin
au sommet de la colline.

tournesol le soir