Archive pour juin 2020

L’amour n’a pas dit son dernier mot

Samedi 27 juin 2020
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Le baiser de Francis Combes



Bientôt vont se lever des résistants d’un genre nouveau
On les verra sur les places, dans les rues, sur les terrasses
se rassembler, se prendre dans les bras, s’embrasser
(malgré les lois, les décrets, les contrôles policiers)
non pour célébrer déjà la victoire de la vie et de la joie
mais pour le défi, le combat, le bonheur dangereux
d’être ensemble et de lutter.

Déjà le simple « ça va ? » que nous échangions rituellement pour nous saluer,
ces deux petits mots qui dans la vie d’avant avaient perdu toutes leurs couleurs,
ne sonnera plus pareil et se fera entendre
comme une question véritable et sincère
comme un mot de passe des partisans de la vie.

Quant au geste longtemps anodin de se serrer la main,
ce geste élémentaire qui nous était ces derniers temps interdit,
il deviendra le signe de ralliement des nouveaux conjurés,
le symbole de la fraternité cachée.

Bientôt vont se lever des résistants d’un genre nouveau
Ils seront ceux qui ne peuvent pas et ne veulent pas vivre sous bulle,
obéir aux robots et aux drones, se faire implanter des puces sous la peau,
aller là où on leur dit d’aller, éviter le moindre contact,  le moindre attouchement,
regarder les autres en ennemis, sourds, méfiants et étrangers les uns aux autres,

Ils seront les conjurés du printemps et de la rosée.
Ils seront ceux qui n’hésitent pas à ouvrir leur cœur, leurs portes et leurs bras
à la vie et à la lumière du jour qui vient,
On les verra à nouveau défiler dans les rues
et distribuer quelle que soit la saison des bouquets de baisers.
Ils seront ceux qui prennent gaiement le risque
de vivre (et de mourir parfois) pour que la vie continue
et qu’elle soit pour tous un peu plus belle,
plus juste, plus solidaire, plus aimante.

On verra ces conjurés d’un genre nouveau
se donner des rendez-vous clandestins
pour crier aux fenêtres, sur les balcons et sur les toits
ce message secret :
« l’amour sur cette terre n’a pas dit son dernier mot ! »

le 4 avril 2020

Le joueur de flûte de Hamelin

Samedi 6 juin 2020

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Chacun connaît la légende
mille fois racontée du magicien
qui libéra la ville de Hamelin
d’une invasion de rats,
une épidémie de rats noirs et gris
qui dévoraient tout le grain
et menaçaient le pays
de ruine, de famine et de maladie.

Sur la place du bourg, le musicien
à l’étrange chapeau pointu
s’étant mis à jouer de sa flûte de bronze
tous les rats le suivirent
jusqu’au pont sur la Weser
où ils se noyèrent.

Chacun se souvient
de ce que fit ensuite  le musicien.
Comme le bourgmestre et ses adjoints
refusaient de payer,
trois jours après, il revint
coiffé d’un chapeau de pourpre
et dans les rues la nuit
il joua sur sa flûte
une tout autre mélodie.

Rattenfänger von Hameln / Spangenberg - Pied Piper of Hamelin / Spangenberg - Le Joueur de flûte d'Hamelin/Spangenberg

Alors cent trente enfants
de la ville de Hamelin
quittèrent leur lit
en chemise de nuit
pour partir avec lui
et jamais on ne sut
ce qu’ils sont devenus.

Certains disent qu’il les a noyés
comme les rats dans la rivière
d’autres, qu’il les a emmenés
dans une grotte, sur une colline,
où jamais ils ne furent retrouvés.

On raconte aussi
(est-ce trop beau pour être vrai ?)
que les enfants, un matin,
en eurent assez du musicien,
de ce joueur de pipeau
qui les menait par le bout du nez.

Ils se mirent eux-mêmes à la musique
composèrent leurs propres airs, jouèrent de la flûte,
de la crécelle, de la trompette, du tambourin
et abandonnèrent le musicien
pour aller, loin de là,
fonder leur propre cité.

Enfants salaires

La confession d’un cerisier

Lundi 1 juin 2020

Cerises à mûrir

pro harmonia mundi

Je me suis planté devant mon cerisier
dans la paix de ce lundi de Pentecôte.
Je l’ai regardé lentement travailler
silencieux, comme indifférent à ses hôtes

ailés qui pour l’instant épargnent ses fruits
lesquels rougissent un peu plus chaque jour.
Et malgré le chant des oiseaux et les bruits
du matin, j’ai pu percevoir son discours

ininterrompu – les arbres communiquent
paraît-il, entre eux… et avec nous aussi –
« Je fomente, disait-il, et sans panique,
une rouge révolution réussie

printanière, pour la joie de toute bouche.
Je n’obéis pas à la loi du marché.
J’offre sans compter  à qui s’approche et touche
pour délicatement cueillir et goûter.

J’ai l’abondance heureuse et je n’y peux rien.
Le marché snobe mes cerises ? Tant pis !
Que les prenne qui les aime… C’est très bien…
Je produis ce qui me chante et c’est gratuit ! »

le 1er juin 2020

Cerisier