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Archive pour novembre 2020

Prends garde à qui te soutient

Lundi 23 novembre 2020

Prends garde couteau dos

La fille qui travaille dans la rue a un souteneur
(aujourd’hui, on dit plutôt un proxénète
car les mots grecs font plus savant)
En échange de sa protection
il prend sa part chaque fois que monte un client

Prends garde Prostitution

Le joueur qui court après le ballon
a des supporteurs et il faut faire avec
même s’ils sont parfois insupportables…
Ils t’applaudissent quand tu gagnes
et te sifflent quand tu perds
(Mais ce sont eux qui paient les billets d’entrée
et qui font tourner la boutique du club)

Prends garde Foot

Le dirigeant du club aussi a son souteneur
Il a investi des millions
C’est lui qui négocie les droits télé
Et quand tu cours,  il reste assis
mais il attend son retour sur investissement

La rédaction s’est réunie ; le journal est sauvé
Le directeur a enfin trouvé un repreneur
« Pas question de toucher à la liberté d’expression. »
a-t-il dit. « Le contenu, ce n’est pas dans mes cordes », …
Mais demain, il va licencier
une partie de la rédaction
et changera le directeur.

En te mariant tu as épousé un beau parti,
un parti riche et sympathique
Tu t’es passé « la corde au cou »
comme on ne dit plus guère,
et le nœud se resserre
Prends garde corde cou

Prends garde à qui te soutient…
Car, parfois, il te soutient
comme la corde soutient le pendu

(Tout ceci, bien sûr, appartient au monde d’avant…
Dans le monde d’après, qui a commencé,
les hommes et les femmes sont libres de leur corps,
Les sportifs jouent pour le plaisir
Les journalistes écrivent ce qu’ils veulent
Tout le monde, même dans les affaires, se marie par amour
Et l’argent n’a pas toujours le dernier mot).

Prends garde communiste

le 23/XI/2020

La Simone

Jeudi 19 novembre 2020

Bois simone

Chaque soir, pliée en deux, elle allait déposer près de son tas de bois
une écuelle de soupe
pour les chats du hameau.
Depuis toujours, elle vivait seule
Il y a longtemps qu’elle ne ramassait plus les poires
qui tombaient de ses arbres
et que personne ne  venait manger

Quand l’infirmière est passée,
et qu’elle a constaté qu’un de ses orteils noircissait,
elle lui a dit qu’il fallait voir le médecin.
Mais Simone ne voulait pas – pour rien au monde – retourner  à l’hôpital.

Le lendemain,
les volets étant restés ouverts toute la nuit,
le voisin s’est inquiété.

Sa porte aussi était restée ouverte.
Où était-elle partie ?
Où avait-elle pu se cacher ?
Elle ne pouvait pas être bien loin…

Les gendarmes l’ont trouvée dans l’eau glacée de la citerne
où elle avait réussi à se glisser
pour se noyer.

Au dernier moment
elle a  dû paniquer ;
mais il était trop tard.
Le couvercle de la nuit s’était refermé sur elle.

Elle ne pouvait plus voir les étoiles, au-dessus de chez elle.
Et les étoiles ne l’ont pas vue non plus, qui flottait dans l’eau

pendant que ses chats allaient chercher refuge ailleurs.

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(Sur sa tombe nous avons dispersé
quelques immortelles séchées).

le 13/X/2020
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Chanson de l’innocent nuage

Mardi 10 novembre 2020

nuage

L’homme au bord de la rivière
l’a trompée et salie

Son innocence s’est enfuie
là-bas derrière la saulaie
avec le petit nuage blanc

Ses collègues à l’atelier
par jalousie l’ont trahie

Son innocence s’est enfuie
là-bas derrière la haie des cheminées
avec le petit nuage blanc

Ses propres camarades
dans son dos on médit

Son innocence s’est enfuie
là-bas derrière l’horizon
avec le petit nuage blanc

Et pourtant, toujours elle suit
qui s’effiloche dans le vent
son petit nuage blanc.

saule3

 

Ô jeunesse

Mercredi 4 novembre 2020

Ô jeunesse
infortunée fontaine

Tes bras se jettent dans les airs
et n’attrapent que le vent

Ils filent entre tes doigts, les jours
durs et gris grains de sable

La vie est périssable

Tu as l’avenir devant toi
mais c’est court, bien court
l’avenir, pour rester là
à attendre
sur le bord  du chemin
celui ou celle qui viendra
te prendre
par la main

Ô fontaine
exubérante et triste
palmier unijambiste
assigné à résidence
sur cette place désertée des humains

Cascade impénitente de la joie de vivre
dont l’eau
se perd au caniveau…
Jaillis, étincelante et libre !
entre dans la danse !
Existe !

Ô jeunesse
jet joyeux et rebelle
feu d’artifice futaie liquide
Ta nacre est translucide

Tu portes dans tes branches un arc-en-ciel.

le 27/X/2020