Les aubes de la Terre ont du pain sur la planche
Pour laver à grande eau les linges de la nuit
Le jour est tôt levé et sa lumière est franche
Frais lavé de la mer je m’approche du lit
Tu bouges doucement en tournant sur tes hanches
Leur axe est toujours là, au centre de ma vie
Tu soulèves à demi le drap de toile blanche
Ton rêve se disperse et le sommeil te fuit
Jamais je ne pourrai me raccrocher aux branches
Et rattraper grand singe les songes de tes nuits
Qu’importe, la mémoire de la nuit toujours flanche
Ce qui compte à présent pour nous deux c’est la vie
Et si sur son orbite notre courbe penche
Cette course au soleil n’est pas encor finie
La nuit peut bien attendre encor pour sa revanche
Elle saura assez tôt effacer nos envies
Bientôt tu me rejoins près de la nappe blanche
Où t’attend dans un bol un reste de la nuit
Plus loin une colline s’affale en avalanche
C’est la « Femme couchée » dans la mer endormie
Esclave tombée à terre ployant sous la palanche
Ou reine à son rivage, au repos, assoupie ?
Cette femme couchée est verte, noire ou blanche
La verrons-nous demain se lever dans un cri
S’étirer au soleil et monter sur les planches
Pour danser de la joie des êtres affranchis ?
Ah ! L’aube de la Terre a du pain sur la planche
Pour laver à grande eau les linges de nos nuits…
(mai 2023 – Sainte Luce-Aubervilliers)